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Le Carignan en résistance

cru boutenac carignan DSCF1368Pendant des décennies, le terroir de Boutenac a été l’un des plus sûrs refuges du carignan, cépage placé sous le feu des critiques. La pérennité de ce patrimoine est un enjeu essentiel pour l’appellation.

Avec le recul, on peut dire qu’il fallait un beau culot pour imaginer une AOC fondée sur le carignan à la fin du XXe siècle. A cette époque le vent soufflait franchement en sens contraire. Partout en Languedoc, les règlements d’appellation fixaient des plafonds au carignan dans l’encépagement, déroulant le tapis rouge au trio syrah-grenache-mourvèdre. Défendre les couleurs du carignan relevait de l’archaïsme ou de la provocation. Imperturbables, sûrs de leur fait, les leaders de Corbières-Boutenac n’ont pas hésité à imposer une proportion de 30 à 50% de carignan dans l’encépagement des exploitations désireuses de produire de l’appellation finalement reconnue en 2005.

Hécatombe

Originaire de Cariñena, dans la province d’Aragon, ce cépage espagnol est arrivé dans l’Aude aux alentours de la Révolution de 1789. Après quoi, plus productif, plus coloré et plus riche en alcool que les cépages autochtones, il s’est imposé dans le paysage languedocien pour parvenir au faîte de sa puissance en 1988, couvrant alors 167000 hectares ce qui en faisait le cépage le plus cultivé en France.
Et puis, soudain, tout a basculé. Tenu pour principal responsable de la qualité médiocre des vins du Midi et donc de la crise, il a été la principale cible des arrachages massifs financés par l’Europe. En 25 ans, quelque 140000 ha de carignan ont été rayés de la carte au profit de “cépages améliorateurs”, et il ne représente plus que 28700 ha en Languedoc-Roussillon en 2015 (sur un total de 32000 ha en France).
Mais, quatorze ans après la reconnaissance de l’appellation, le contexte a sensiblement évolué. La mortalité précoce de la syrah, les progrès techniques et le réchauffement climatique ont favorisé le retour en grâce du carignan, si bien que Boutenac peut se flatter d’avoir été un vrai foyer de résistance de ce cépage dont il est de bon ton désormais de vanter l’adaptation à la sècheresse, les parfums de fruits noirs, de garrigue et d’épices, la trame tannique et l’acidité. Les chroniqueurs spécialisés s’accordent à mettre sur son compte le fort caractère identitaire des vins de l’appellation.

Une parenthèse de 30 ans

Des questions se posent cependant. Concernant notamment la sauvegarde d’un patrimoine remarquable de vieilles vignes dont certaines ont allègrement franchi le cap des cent ans. Les tentatives de complantation de jeunes ceps pour combler les manquants ont le plus souvent échoué. « Les racines des vieilles souches ont tellement colonisé les sols qu’elles étouffent les jeunes plants » expliquent Jean-Marc Reulet et Louis Fabre. A tel point qu’au-delà d’un certain seuil de manquants, parfois la mort dans l’âme, les propriétaires font le choix d’arracher les vieilles vignes en vue de les remplacer. Jusqu’ici, cela n’a pas eu d’incidence sur la production de corbières-boutenac. En 2017, le carignan représentait toujours 40% des surfaces revendiquées dans l’appellation avec 86 hectares de vignes âgées de plus de 60 ans pour la plupart. Le réservoir de vieilles vignes en gobelet est conséquent. 650 hectares de carignan avaient été recensés en 2004 dans l’aire de l’appellation à naître ; il en reste 433 ha et ce potentiel n’est donc pas encore pleinement exploité.
Mais la question de son renouvellement pourrait se poser. « Il n’y a pas pratiquement pas eu de plantation entre 1975 et 2005 » reconnaît Jean-Marc Reulet, propriétaire du château Hauterive-le-Haut. « Beaucoup ont cédé à tentation du modernisme et des primes, ont arraché carignan et cinsault pour planter de la syrah ou du mourvèdre, explique Etienne Besancenot. Quand je suis arrivé au château de Caraguilhes en 2008, j’ai dû rapidement planter du carignan pour répondre au cahier des charges de l’appellation ».

Nouvel élan

Le fait d’exclure les jeunes vignes de carignan du bénéfice de l’appellation pendant les neuf années suivant leur plantation a également eu un impact, ajoute Louis Fabre. Ça a peu d’incidence sur une grande exploitation, mais c’est pénalisant sur un petit domaine ». Cette mesure est-elle justifiée ? Il est assez généralement admis qu’une vigne de carignan a besoin d’une dizaine d’années pour s’installer convenablement. « Il ne faut pas sous-estimer les jeunes vignes, plaide cependant Etienne Besancenot. Leurs raisins sont plus tendres, il faut être plus vigilant sur le point de maturité, mais ils peuvent donner rapidement de beaux résultats à condition que l’on ait planté aux bons endroits ». Louis Fabre approuve : « Il faut impérativement juguler la productivité naturelle de ce cépage, surtout dans les premiers temps, tailler court, vendanger en vert si nécessaire, sinon il mûrit mal et là, ça ne pardonne pas. Mais si on limite le rendement à 20 hl/ha, on peut avoir des jus magnifiques dès la quatrième feuille ».
« Nos adhérents plantent une dizaine d’hectares par an, confie Benoît Fillaquier, directeur de la coopérative Terre d’Expression à Fabrezan. Le carignan est le cépage le plus typique de Boutenac et le plus adapté à la sècheresse. Il importe de maintenir ce patrimoine, il en va de l’identité du cru ».
Longtemps écarté des aides à la plantation, le carignan peut à nouveau en bénéficier depuis quelques années en Languedoc-Roussillon. Ce qui a ranimé l’élan : 40 ha plantés en 2008, 117 ha en 2012, 220 ha en 2017.
Pour l’heure, les pépiniéristes font face à la demande. Mais les seize hectares de vignes-mères de greffons de carignan recensés en France, dont le tiers contrôlé par la Chambre d’agriculture de l’Aude, pourront-ils encaisser une nouvelle progression spectaculaire ?

 

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